« Les villages sont les pieds sur lesquels la chefferie doit s’appuyer pour se relever. Si les villages se lèvent la chefferie sera forte et indépendante de l’aide extérieure (…). Nous devons passer du mode de vie de la dépendance au mode de vie des services (…) ». Mwami Ntawenderundi Rubenga II, Chef de la Collectivité Chefferie de Rubenga, dans la partie nord de l’île d’idjwi au Sud-Kivu/RDC.
C’est par ces mots que le Mwami Rubenga a rappelé aux chefs traditionnels de sa collectivité chefferie, qu’ils sont des agents stratégiques du changement au sein de leurs groupements et villages.
Mwami Rubenga, ainsi que des chefs de 3 groupements et 33 villages, des responsables de services et des élus locaux de la collectivité chefferie de Rubenga, ont participé du 23 au 27 mai 2022 à Idjwi Nord, à un atelier d’apprentissage des outils de planification catalyseurs des changements de l’approche Gender Action Learning System (GALS). Le premier gardien des coutumes et traditions de la chefferie de Rubenga a fait appel à Feed the Future RDC, Renforcement des Chaînes de Valeur (SVC Lima-Faidika), financé par le peuple américain et l’USAID, pour faciliter cet atelier. Ceci après des échanges que le projet a eu en novembre 2021 avec 36 chefs de groupement et de village de cette collectivité chefferie.
« la rencontre avec les autorités coutumières de novembre 2021, également souhaité par le Mwami Rubenga, visait juste à les informer et les sensibiliser sur les approches de développement durable mises en œuvre dans leurs entités par SVC Lima-Faidika notamment en matière de résilience, des moyens d’existence, d’ égalités des sexes, d’inclusion sociale, etc. ; et à les encourager à accompagner les énergies positives et les dynamiques de changement qui se mettent en place à la suite des activités de SVC Lima-Faidika. Plus particulièrement, l’agriculture étant un secteur qui peut booster le développement local de manière autonome et durable, SVC Lima-Faidika avait invité les chefs locaux à soutenir les initiatives individuelles et communautaires de développement des ménages des membres des Organisations des Producteurs (OP) et des coopératives de café, haricot et soja partenaires du projet. C’est à l’issu de cette rencontre que le Mwami Rubenga avait manifesté le besoin d’approfondir les connaissances des différentes autorités traditionnelles et leaders locaux sur les outils de planification et gestion des ressources simples, réalistes et pratiques de l’approche GALS », explique Bertin Bisimwa Kabomboro, Responsable de la composante Genre, Jeunesse et Inclusion Sociale au sein de SVC Lima-Faidika.
Les chefs traditionnels de la collectivité chefferie de Rubenga identifient des actions communautaires à réaliser d’ici une année avec des moyens locaux
Pour que les chefs traditionnels et leaders locaux se lèvent et exercent efficacement leur rôle, de prendre des décisions éclairées et enclencher ainsi le développement local à partir de la base, SVC Lima-Faidika a utilisé et adapté lors de ce deuxième atelier de mai 2022, certains outils de la méthodologie Gender Action Learning System (GALS). La route vers la vision, le profil de la pauvreté et les caisses de gestion des ressources et revenus, vont permettre aux chefs traditionnels d’ être capables – d’analyser les enjeux du développement local, – d’élaborer des visions économiques et des objectifs sociaux avec des plans d’actions simples et concrets à réaliser et à évaluer dans des délais raisonnables, – d’identifier les ressources disponibles et les stratégies pour les mobiliser ; – de reconnaître et identifier les défis et concevoir des stratégies pour les contourner.
Ces différents responsables et leaders communautaires qui n’ont pour la plupart pas des moyens de leurs politiques, ont décidé de commencer par notamment doter leurs villages et groupements des Activités Génératrices de Revenu (AGR). Dunia Nyamulinda âgé de 52 ans, est depuis 13 ans Chef de village de Buyumbu en groupement de Kihumba. Il explique :
« Les chefs de village ne sont pas payés et ne perçoivent aucune taxe. Les seuls avoirs/ressources et forces que nous avons c’est notre population et nos ressources naturelles. A Buyumbu nous avons environs 6.700 habitants ; hommes, femmes, jeunes et enfants confondus. Nos ressources naturelles sont des grandes opportunités que nous pouvons saisir pour développer notre village. Nous avons des carrières de sable et des pierres, nous avons des rivières et nous vivons non loin du lac Kivu à l’extrême nord de l’ile proche de Goma et du Rwanda. Dans les échanges que nous venons d’avoir village par village, j’ai entre autres identifié pour mon village, l’électricité, l’accès à l’eau potable, le quai d’accostage comme besoins prioritaires pour ma population et auxquels nous pouvons répondre en nous organisant localement.», confie-t-il.
Certains chefs ont ciblé comme sources de revenu pour réaliser localement des petits projets communautaires ; la construction des salles polyvalentes que leurs villages mettront en location pour les réunions, les fêtes et autres manifestations culturelles. D’autres ont pensé à doter leurs villages des filets de pêche, voire des étangs piscicoles pour la production et vente des poissons. D’autres encore ont estimé que les villages peuvent investir dans l’exploitation des carrières de sable et des pierres, etc.
Ces différentes AGR ciblées, seront dans un premier temps et en grande partie financées par les contributions des habitants, les quelques moyens que la chefferie pourra mettre à leurs dispositions, ainsi que les opportunités locales identifiées dans chacune des entités. Les fonds générés par ces AGR serviront par la suite aux financements, d’autres projets communautaires prioritaires identifiés pour leurs entités parmi les besoins à court, moyen et long terme; comme la construction ou la réhabilitation des ponts, des adductions d’eau, la maintenance des routes.
Afin de participer efficacement au développement de leur collectivité chefferie, les différents chefs de groupement et de village, se sont engagés, de commencer par sensibiliser leurs administrés pour qu’ensemble, ils définissent des stratégies et des mécanismes locaux de mobilisation de fonds.
Pour le Mwami Rubenga, cet atelier tombe à point nommé et leur donne une grande satisfaction, au moment où sa collectivité chefferie s’apprête a actualisé son plan local de développement pour les 5 ans à venir. Ce renforcement des capacités, a-t-il dit, va permettre à sa chefferie de focaliser plus ses actions sur des services qu’elle peut rendre à sa communauté sans attendre l’aide extérieure.
L’intérêt pour SVC Lima-Faidika est qu’en effet, les autorités locales de la collectivité chefferie de Rubenga, qui constituent une interface essentielle entre la communauté et l’État, puissent bien planifier l’avenir de leurs entités et pérenniser les interventions de développement du projet sur l’île.
Rédaction