Nombreux consommateurs au Sud-Kivu, ont surement déjà vu ou remarqué sur certains aliments comme le maïs, l’arachide, le sorgho, le piment et de fois sur le manioc, des champignons ou moisissures. Ces champignons ou moisissures attaquent et recouvrent l’aliment en partie ou en totalité. Ils ressemblent à des mousses de couleur soit grisâtre, verdâtre ou encore noirâtre. Des nombreuses recherches menées sur le sujet alertent qu’il faut faire très attention avec certains d’entre ces champignons, surtout ceux du genre « Aspergillus ». Ces recherches démontrent que, ces champignons de la famille des « aspergillus » produisent un poison/toxine indétectable à l’œil nu, qui n’a pas de gout, ni d’odeur appelé « aflatoxine ». La consommation régulière des aliments contaminés par ce poison (aflatoxine), même cuits, est très dangereux pour la santé, disent ces recherchent. Selon en effet ces recherches, à forte concentration, les aflatoxines peuvent provoquer chez l’homme le cancer du foie, l’affaiblissement du système immunitaire et le ralentissement de la croissance chez l’enfant en cas d’allaitement par une mère déjà affectée par cette toxine/poison. Chez les animaux (bétail et volaille), il y a diminution de la productivité et de la rentabilité lorsqu’ils consomment des aliments contaminés par les aflatoxines. Le lait, la viande ou les œufs obtenus d’animaux nourris avec des aliments contaminés peuvent contenir des aflatoxines et provoquer des maladies hépatiques chez l’homme.
C’est contre entre autres ces dangers que Feed the Future RDC, Renforcement des Chaînes de Valeur (SVC Lima-Faidika) financé par le peuple américain et l’USAID, a sensibilisé du 6 au 11 juin 2022 près de 100 acteurs agricoles de Kabare.
« Au cours de nos nombreuses visites de terrain auprès des producteurs et vendeurs des haricots et soja, nous avons remarqué dans leurs dépôts, des signes de décomposition ou pourriture sur certains autres produits agricoles, en majorité sur le maïs et le manioc qui sont deux aliments de base dans nombreux ménages ici au Sud-Kivu. Les gens achètent et consomment ces aliments moisis sans savoir s’ils contiennent déjà un poison nuisible à la santé humaine et animale », a renseigné Linda Burume, spécialiste Post-Récolte chez SVC/Lima-Faidika et facilitatrice des ateliers de sensibilisation contre l’aflatoxine.
Les acteurs ciblés par cette sensibilisation sont des membres des Organisations des Producteurs (OP), des concessionnaires, des tenanciers des Boutiques d’Intrants Agricoles (BIA) et des responsables des Centres de Collecte des produits Agricoles (CCA-FSP) appuyés par Mercy Corp. Nombreux d’entre ces acteurs, ont avoué n’avoir pas beaucoup de connaissances sur l’aflatoxine.
« Nous voyons souvent ces moisissures sur certains produits agricoles que nous achetons auprès des producteurs. Nous ne savions pas que ça pouvait contenir des substances dangereuses pour notre santé », a confié Bifuko Shamurho Christophe, membre de « Tuwe Umoja » une association de vendeurs des haricots, soja et maïs, au marché de Rukungwa à Katana, territoire de Kabare.
Bashimbe Daniel, Gérant de Ihusi Agro Business, a confié aussi que : « C’est la première fois que j’entends parler de l’aflatoxine et comment elle peut ravager aussi bien les hommes que les animaux ».
La spécialiste Post-Récolte de SVC Lima-Faidika a pour cela renseigner les acteurs agricoles de Kabare sur le fait que ces champignons/moisissures peuvent se développer depuis le champ, à la récolte, ou encore pendant le stockage en cas de défaut de séchage ou de réhumidification. La présence de saleté, d’insectes et des ravageurs, la durée de conservation, le vent, la pluviométrie (pluies abondantes), l’humidité, sont entre autres facteurs qui favorisent le développement de ces champignons toxiques sur les produits agricoles.
La lutte biologique et les bonnes pratiques agricoles pour prévenir et réduire la contamination des cultures par les aflatoxines
A date, certains pays africains comme le Nigéria, le Burkina Faso, recourent à la lutte biologique et utilisent notamment l’ « AFLASAFE ». La Spécialiste Post-Récolte de SVC Lima-Faidika a informé que c’est l’Institut International d’Agriculture Tropicale (IITA) et ses partenaires qui ont mis au point cette solution pour combattre les aflatoxines responsables d’empoisonnement des hommes et des animaux. Cette technologie qui a la capacité de réduire 80 à 90 % de contamination des cultures par les aflatoxines est encore en phase expérimentale dans la station de l’IITA/Kalambo au Sud-Kivu en RDC.
Dans ce contexte, les bonnes pratiques agricoles dans les étapes de production, récolte, séchage, transport, stockage et commerce, ont été vivement recommandées aux acteurs agricoles de Kabare sensibilisés par SVC Lima-Faidika : « Avant la récolte, les producteurs peuvent faire usage des insecticides, herbicides et pesticides pour lutter efficacement contre les maladies et les ravageurs, faire la récolte au bon moment et assurer une gestion appropriée des déchets de culture dans les champs. Pour ce qui est des stratégies post-récoltes les producteurs doivent veiller à bien sécher les cultures, bien trier par exemple les grains en enlevant ceux contaminés, décolorés ou endommagés. Les aliments doivent être entreposés dans un lieu bien aéré, propre, sec, à l’abri des rongeurs et des insectes. Pour cela nous recommandons toujours à nos partenaires de conserver leurs productions, surtout les grains, dans des sacs PICS. Ces emballages doublés à l’intérieur par deux sacs plastiques, empêchent les insectes responsables de la pourriture d’entrer et protègent bien les grains contre des éventuelles contaminations de champignons », a conseillé, la spécialiste Post Récolte de SVC Lima-Faidika.
A l’issu de ces ateliers, les acteurs agricoles de Kabare sensibilisés, se sont engagés à prêter désormais une attention particulière à ces moisissures toxiques pour éviter de s’exposer eux-mêmes, leurs familles, les autres consommateurs ainsi que les animaux (bétail et volaille) aux maladies. Ils ont déclaré qu’ils vont informer les paysans contre ces dangers.
Ces sensibilisations vont s’étendre également dans les territoires de Kalehe, Walungu et Idjwi, zones cibles du projet SVC Lima-Faidika. L’enjeu du projet est de réduire les risques des maladies liés à une mauvaise alimentation ainsi que les pertes quantitatives et qualitatives de production qui influent sur les revenus des ménages du Sud-Kivu. SVC Lima-Faidika appui en effet depuis 2017 le secteur agricole au Sud-Kivu, principalement les chaînes de Valeur Café, haricot et soja. Parmi ses objectifs ; l’augmentation des revenus des ménages agricoles, ainsi que l’amélioration de l’accès aux aliments nutritifs.
Rédaction