«Je suis mère de 8 enfants mais séparée avec mon mari qui m’a fait souffrir avant de me renvoyer du foyer. Une situation qui est arrivé car je suis victime du viol à Kaniola par des rebelles pendant que je partais à Ninja ». Propos de Marie (nom emprunté) vivant dans le territoire de Walungu en province du Sud-Kivu où des femmes continuent à être victimes des violences sexuelles, basées sur le genre et conjugales pourtant mariées légalement. Elle l’a fait savoir ce lundi 14 mars 2022 à Walungu, lors d’une descente effectuée dans cette partie dans le cadre de la journée du 8 mars dédiée aux droits des femmes.
Cette dernière a certifié larme aux yeux qu’elle est double victime des violences sexuelles et conjugales ; avant d’augmenter qu’après avoir été violée, son conjoint non seulement lui privait de tout, mais aussi lui agressait verbalement et physiquement devant tout le monde, ce qui lui torturait davantage.
«…après avoir été violée je ne parlais plus devant mon mari. Il m’humiliait même devant les enfants et ses familiers ainsi que mes voisins. Je n’avais plus droit à son argent ni à faire l’amour avec lui. Il m’avait même interdit de continuer à faire le commerce en me ravissant tout l’argent que je possédais. Ensuite il m’avait abandonné soi-disant que je suis une épouse des rebelles. C’est par là que j’ai commencé ma souffrance ici sur terre », a témoigné Marie Chantal avec un ton de pitié.
Des défenseurs des droits humains dénoncent la persistance des violences conjugales à l’égard des femmes dans des ménages du territoire de Walungu.
Face à cette situation, Eliane Polepole, Chargée des Programmes de l’Association des Femmes des Médias (AFEM) dit que c’est une désolation de voir que les violences conjugales continuent à se pérenniser dans différents territoires du Sud-Kivu notamment à Walungu. Pour que ça soit éradiqué, celle-ci appelle ces femmes victimes à dénoncer tous les cas de violences conjugales auprès des instances habilitées.
« Nous sommes indignés par le comportement de ces hommes qui battent leurs femmes et qui arrivent même à ôter leurs vies par suite des coups et blessures. Nous pensons que c’est un problème sur lequel il faut encore travailler parce que dans nos territoires on continue à penser que l’homme est le chef suprême qui ne doit pas être contredit. (…) Cependant, il y a encore des femmes qui ne dénoncent pas ces cas par peur de dissoudre leur mariage. Nous les appelons à sortir de leur silence pour qu’elles soient considérées au même titre que l’homme », a-t-elle insistée.
Regret partagé par Solange Lwashiga, Défenseuse des droits humains et membre du mouvement Rien sans les femmes, qui se mécontente du fait que le foyer soit devenu pour plusieurs femmes, un lieu d’insécurité et non de paix. Elle reste convaincue que si des sensibilisations se font à tous les niveaux, le comportement des hommes peut changer surtout dans les milieux ruraux.
Une situation que la Cheffe de service Genre, femme-famille et enfant de Walungu, Esperance Ngomora condamne avec toute énergie, avant de souligner que son service travaille sur les causes de ces violences conjugales pour que les femmes vivent dans un climat de paix dans leur foyer. Elle met en garde tout homme qui ne considère pas sa femme comme son similaire.
« Si vous regardez ici chez nous à Walungu, vous trouverez que plusieurs hommes ne considèrent pas les femmes comme leurs semblables. On se demande même si un jour ces hommes avaient eu des engagements avec leurs épouses. (…) A notre niveau, lorsque nous sommes informés sur un cas, nous referons le dossier vers les structures de prise en charge pour que la victime soit rétablie dans ses droits. Nous sommes donc engagés à traquer tout homme qui sera accusé des violences conjugales car cette situation conduit même à la mort de plusieurs femmes mais en silence », a expliqué Espérance Ngomora.
Pour Maître Sourire Muhigirwa, défenseur judiciaire au Sud-Kivu, la constitution de la République Démocratique du Congo à son article 16 souligne que la personne humaine est sacrée et que l’Etat a l’obligation de la respecter et de la protéger. Aussi les articles 44, 45 et 46 du code pénal Congolais qui répriment les infractions de manière générale sur les femmes car les violences conjugales peuvent conduire au meurtre. Et d’ajouter que : « La RDC a ratifié beaucoup des textes et instruments juridiques internationaux parmi lesquels la résolution 1325 et la résolution 2467 qui fustigent les violences conjugales et toutes les violences qui sont commises sur les femmes. Les articles du code pénal sont à leur tour spécifique sur les conséquences des violences conjugales notamment le meurtre, l’assassinat etc. ».
Ce défenseur judiciaire estime que si l’état Congolais s’investit dans ces cas de violences conjugales, les femmes victimes peuvent recouvrer une réparation notamment la condamnation des bourreaux, le suivi des prononcées des jugements et l’indemnisation des survivantes de ces violences.
Elie Bigaba, JDH