Comment les autorités locales peuvent-elles encourager et/ou accompagner les initiatives individuelles et communautaires de développement des ménages des membres des Organisations des Producteurs (OP) et des coopératives de café, haricot et soja partenaires du projet Feed the Future RDC, Renforcement des Chaînes de Valeur (SVC/ Lima-Faidika), financé par le peuple américain et l’USAID? Cette question était au cœur des échanges qui se sont tenus le 25 novembre 2021 entre SVC/Lima-Faidika et 36 chefs de groupement et village de la collectivité chefferie de Rubenga dans la partie nord de l’île d’Idjwi au Sud Kivu. C’était autour des autorités de la territoriale, de la chefferie et du chef d’équipe de SVC/ Lima- Faidika.
Conviée par le Mwami Ntawenderundi Rubenga II, Chef de la Chefferie, l’un des grands objectifs de cette rencontre d’information, formation, sensibilisation, était d’améliorer les connaissances des autorités coutumières et leaders locaux en Chefferie de Rubenga sur les approches de développement durable mises en œuvre dans leur entité par SVC/Lima-Faidika notamment en matière de résilience, des moyens d’existence, d’ égalités des sexes, d’inclusion sociale, etc. L’autre grand objectif était d’amener ces chefs locaux à différents niveaux(services techniques de la Chefferie, les 3 Chefs de groupement et les 33 Chefs de village ainsi que l’administration du territoire) à savoir canaliser les énergies positives de l’ensemble de la population et particulièrement accompagner les dynamiques de changement qui se mettent en place à la suite des activités de SVC/Lima-Faidika. Et ce, en vue de mettre en œuvre des projets socio-économiques et booster le développement local de manière autonome et durable.
Comme l’a indiqué Bertin Bisimwa Kabomboro, Spécialiste en Genre, Jeunesse et inclusion Sociale chez SVC/Lima-Faidika et animateur de cette journée, c’est depuis septembre 2019 que SVC/Lima-Faidika a étendu sur l’île d’Idjwi ses activités en appui au secteur agricole au Sud-Kivu. Sur cette île où certains villages sont très enclavés, SVC collabore autant avec des acteurs privés que des structures comme les coopératives, concessionnaires et organisations des producteurs agricoles dans les chaînes de valeur café, haricot et soja.
« Les activités de SVC dans le secteur agricole visent l’augmentation des revenus des ménages ainsi que leur accès aux aliments nutritifs. L’une des approches que SVC utilise pour qu’en plus de leurs activités agricoles, les ménages puissent avoir plus de contrôle sur leur vie, mieux gérer et diversifier les ressources familiales afin d’améliorer leurs conditions de vie et catalyser le changement dans leurs communautés ; est la méthodologie « Gender Action Learning System » (GALS). Cette approche a le mérite d’avoir des outils de planification et d’évaluation simples, faciles à réaliser et catalyseurs des changements adaptés aux catégories des personnes instruites(alphabétisées) ou non instruites. Deux ans après, des changements très significatifs en terme d’augmentation de revenus dans les ménages des membres des structures accompagnées par SVC ainsi que des dynamiques communautaires ont été enregistrées à travers des visions économiques partagées au sein des ménages, des groupes et à l’échelle des villages. Les résultats sont impressionnants. Cependant, lors des suivi et évaluation des impacts de ses activités, SVC ainsi que les bénéficiaires directs ont observé que lorsque les gens améliorent leurs situations économiques ou se développent (surtout ceux qui étaient dans des situations de fragilité et de vulnérabilité, celles qui ont améliorés leur leadership et résilience, les victimes des violences sexuelles et basés sur le genre qui se relèvent), cela crée de la jalousie ou des incompréhensions au sein de la communauté. Des ménages qui ont évolué sont ainsi confrontés aux défis d’ordre sécuritaire par rapport à leurs actifs et ceux liés à la gouvernance locale », a expliqué Bertin Kabomboro.
Cette rencontre avec tous les chefs de la collectivité chefferie de Rubenga s’est donc voulu être un cadre déclencheur des solutions pour l’avenir d’un développement collectif de cette entité. Et c’est avec l’un des outils catalyseurs de changement de la méthodologie Gender Action Learning System (GALS) « Route vers la vision » et des vidéos des témoignages de succès des membres de ses organisations partenaires que SVC/Lima-Faidika a engagé des discussions constructives sur la responsabilité partagée des chefs des groupements et des villages de la collectivité chefferie de Rubenga de promouvoir le développement et le bien-être de leurs populations.
A l’aide des dessins simples et très explicites, étape par étape, les chefs des groupements et des villages ont été amené à tracer la vision de développement de leurs groupements et leurs villages respectifs d’ici une année, cinq ans et plus. Nombreux d’entre eux ont surtout compris comment la vie de certains d’entre leurs administrés appuyés par SVC a changé progressivement, comment ils peuvent accompagner les efforts de ces derniers et comment eux-mêmes peuvent identifier et s’impliquer davantage dans leurs milieux en vue de promouvoir et appuyer des initiatives de développement, et ce, sans attendre l’aide extérieur. Et ceci, en saisissant simplement les opportunités de leur environnement et en identifiant de manière anticipée les défis qui pourraient bloquer la réalisation de leurs projets.
Parmi les visions de développement tracées que les différents chefs de village ont reconnu pouvoir mettre en œuvre en unissant les efforts avec leurs administrés, on a noté le traçage et l’entretien des routes de dessertes agricoles, la construction des ponts et des adductions d’eau, la construction des locaux destinés aux bureaux administratifs dans les villages où ils n’en existent pas encore, etc.
L’un des chefs de village a même déclaré : « Cette réunion a été une occasion spéciale parce que nous avons tous pu participer et comprendre comment nous pouvons nous appuyer sur nos administrés pour développer nos entités.»
Un autre chef a renchéri : «J’ai tracé une vision très claire pour mon village. Dans une année, de janvier 2022 jusqu’en janvier 2023, je vais mobiliser ma communauté pour tracer une route qui mène vers la carrière des pierres qui se trouve dans mon entité en la reliant avec la route principale de la Chefferie. Si nous y arrivons, la carrière des pierres sera non seulement une activité génératrice des revenus pour le village, ça va créer de l’emploi, mais aussi le coût pour avoir les pierres sera moindre pour d’autres projets de développement de notre village que nous allons mettre en place », a confié satisfait de la journée, Bafakulera Tabaro Gilbert, Chef de village de Bulega.
Pour le Mwami Ntawenderundi Rubenga II, les villages sont les pieds sur lesquels la chefferie peut s’appuyer pour se relever. Si les villages se lèvent, la chefferie sera forte et indépendante de l’aide extérieure.
« J’ai apprécié cette journée d’échange et de réflexion entre les Chefs de village et le projet SVC. Comme vous l’avez vu, tous les chefs sont déterminés et se sont engagés à mettre en œuvre chacun dans son village au moins un petit projet de développement d’ici une année. Cet engagement est pour nous déjà un grand pas pour le changement de notre chefferie car avec cette approche de SVC, nous espérons passer du mode de vie de la dépendance au mode de vie des services », a déclaré Mwami Rubenga II.
Le Mwami et ses chefs de village se sont aussi engagés à protéger et appuyer les efforts de leurs administrés qui sont encadrés par SVC/Lima-Faidika. Il a été recommandé à certains pami eux qui ont participé comme témoins à cette journée d’échange de travailler main dans la main avec les chefs de leurs villages respectifs.
A la fin de la journée, les chefs de village de la collectivité chefferie de Rubenga ont estimé que cet atelier d’un jour a été bref. Ils ont demandé pour cela que de tels échanges aient lieu régulièrement, affirmant qu’il faudrait plus d’une journée pour aborder et intérioriser ce seul outil de la planification de la méthodologie GALS et mieux planifier l’avenir de leurs entités.
Rédaction